Comprendre les enjeux de l’agriculture

Réunis en Assemblée générale extraordinaire, du 9 au 11 janvier, à Kampala, les chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine (UA) ont adopté un agenda intitulé « programme pour la construction de systèmes agroalimentaires résilients et durables » .  Il s’inscrit dans le cadre du Programme détaillé de développement de l’agriculture en Afrique (PDDAA), lui-même inscrit, à son tour, dans l’Agenda 2063 qui est « un schéma  et un plan directeur visant à transformer l’Afrique en puissance mondiale de l’avenir. C’est le cadre stratégique du continent qui vise à atteindre son objectif de développement inclusif et durable » selon les termes mêmes de l’UA. L’Agenda de Kampala est une feuille de route ambitieuse pour le développement de l’agriculture africaine pendant la décennie 2026-2035.

 

L’agenda de Kampala constitue un véritable saut qualitatif dans la mesure où il adopte une approche holistique qui  inclut les questions de rendement et de développement dans une vision plus sophistiquée des modes de production et des systèmes alimentaires.

Contrastant avec la déclaration de Malabo, cet agenda insiste sur la protection de l’environnement et la gouvernance pour guider un développement plus efficace de l’agriculture. Ainsi, il inclut des domaines nouveaux concernant la santé alimentaire et l’inclusion des femmes et des jeunes.

Le succès de cet agenda qui débutera en 2026 dépend de ses déclinaisons dans les 55 États membres de l’UA. La réussite sera au rendez-vous si ces derniers élaborent des plans nationaux d’investissement agricole cohérents avec les objectifs continentaux du PDDAA et l’UNFSS (United Nations Food Systems Summit ou Sommet des systèmes alimentaires des Nations Unies). Ce dernier est une initiative lancée par les Nations-Unies pour transformer les systèmes alimentaires mondiaux afin de les rendre plus durables, inclusifs et résilients. Le succès de la décennie Kampala dépend aussi de la volonté politique des gouvernements nationaux et de leur aptitude à adopter une démarche collaborative.

Le sommet de Kampala a été préparé en amont par des réunions techniques des experts et hauts fonctionnaires des ministères de l’Agriculture des pays membres de l’UA.

Voici six des principaux engagements pris au sommet de Kampala :

  • Intensifier la production, l’agro-industrialisation et le commerce de denrées alimentaires durables dans le cadre d’un objectif d’augmentation de la production agroalimentaire de 45% d’ici la fin 2035.

Parmi les moyens cités pour atteindre cet objectif de croissance figurent la volonté de réduire de 50% les pertes post-récolte, le triplement des échanges intra-africains et l’augmentation de la part des produits transformés localement à 35% du PIB agroalimentaire.

En amont, les pays membres s’engagent à renforcer la fonctionnalité des intrants agricoles (semences, engrais, eau) grâce à des pratiques agricoles durables. La déclaration de Kampala n’oublie pas l’importance d’un environnement politique et réglementaire adéquat.

L’Afrique entend prendre sa part dans le développement et le recours aux nouvelles technologies, aux biotechnolgies, à l’intelligence artificielle, à la numérisation et à l’agriculture de précision.

Le développement agricole sera inclusif ou ne sera pas. Il devra intégrer les petits exploitants, les jeunes et les femmes. L’accent est mis, en outre, sur la régionalisation des échanges et de la chaîne des valeurs.

  • Engagement à stimuler l’investissement et le financement de la transformation agricole. L’UA s’engage à mobiliser $100 milliards d’origine publique et privée.

Les infrastructures seront financées par des fonds publics. Les banques seront incitées à organiser la distribution de crédits aux exploitants.

  • Engagement à assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle du continent. L’UA veut éliminer la faim d’ici 2035 et réduire les retards de croissance de 25%.

L’accent sera mis sur l’élaboration d’une alimentation saine. Il faudra stimuler la production et la consommation d’aliments, d’animaux et de poissons traditionnels nutritifs et indigènes. Les normes sanitaires et phytosanitaires seront améliorées et renforcées tant pour l’alimentation humaine qu’animale.

  • Engagement à promouvoir l’inclusion et des moyens de subsistance équitables.

Cela inclut la réduction de 50% du nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté et de 50% l’écart de rendement entre agriculteurs et agricultrices. De plus, il faudra autonomiser 30% des femmes, des jeunes et des individus vulnérables.

Pour atteindre ces objectifs, il conviendra d’améliorer les infrastructures et l’accès aux services sociaux et aux ressources productives ( crédits, terres, technologies…)

  • Engagement en faveur de la mise en place de systèmes agroalimentaires résilients aux chocs climatiques, socio-économiques et environnementaux.

Quantativement, 30% des terres agricoles devront être mis sous gestion durable et 40% des ménages mis à l’abri des chocs d’ici 2035. Les moyens pour atteindre ces objectifs seront les investissements dans les capacités humaines et physiques.

La déclaration mentionne aussi le renforcement des systèmes d’alerte précoces et de réponse aux divers chocs. Le résultat devrait être une amélioration de la résilience du système agricole.

  • Engagement en faveur du renforcement des systèmes agroalimentaires. D’ici 2028, tous les États africains devraient avoir adopté le PDDAA et l’agenda de Kampala concurremment à une amélioration de la gouvernance.

Source : Union africaine